Afin de mieux comprendre où en était la recherche sur la solution biosolaire, nous avons interrogé plusieurs personnes travaillant dans ce domaine.
Le Cerema et le projet PROOF
Rémy Claverie, chercheur au Cerema responsable scientifique du
projet PROOF (Photovoltaic and greenROOF), nous a parlé de son projet de recherche. Celui-ci consiste à comparer les bénéfices environnementaux et énergétiques des toitures biosolaires avec d'autres techniques que l'on rencontre couramment en toiture : toiture standard en gravier, toiture avec peinture réfléchissante (coolroof) et une toiture végétalisée avec récupération des eaux de pluie.
Selon lui, la toiture biosolaire est encore une technologie jeune, et même si la bibliographie tend à se densifier depuis les années 2010, il existe encore peu d'études scientifiques, notamment en France. C’est pourquoi, si l’on peut déjà dire que cette solution octroie des bénéfices sur la biodiversité et sur l'amélioration de la production électrique du panneau photovoltaïque, nous ne pouvons pas être très précis. C’est d’autant plus le cas que le nombre de facteurs à prendre en compte est immense (conditions climatiques, type de panneaux photovoltaïques, etc…).
Le projet PROOF est toujours en cours et devrait voir ses résultats publiés dans la deuxième moitié de 2023. Ce projet est subventionné par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR19-CE22-008).
L'Institut National de l'Energie Solaire (INES) au Bourget-du-lac et son démonstrateur de comparaison de performance de toitures terrasses solarisées
Pour en savoir plus sur les toitures biosolaires de
l’INES, nous avons rencontré Olivier Verdeil, responsable du pôle photovoltaïque à l’INES PFE (Plateforme Formation et Evaluation).
Dans le cadre de l’activité de formation et d’expertise, il a été décidé de mettre en place un démonstrateur (afin d’avoir une approche plus pédagogique). Celui-ci a pour but de comparer la performance des toitures terrasses solarisées selon le type d’albédo et la technologie des modules photovoltaïques. C’est pourquoi il a été installé 24 panneaux solaires sur 4 zones avec différentes configurations (chacune avec 4 modules PV monofaciaux et 3 modules PV bifaciaux) :
L’installation des différentes configurations n’a pas demandé d’études préalables approfondies car la toiture était déjà très renforcée. Il a seulement fallu compenser la charge apportée par la partie biosolaire en ôtant une grande part des graviers sur la zone correspondante.
Il faut noter que l’expérimentation se concentrent sur la performance électrique des panneaux solaires, et non sur les questions d’apports environnementaux.
Comme pour l’étude PROOF du CEREMA, les résultats précis de l’expérimentation ne sont pas encore disponibles. Le démonstrateur dans sa globalité n’a été mis en place qu’en octobre 2022, il faudra donc attendre l'été 2023 pour obtenir suffisamment de données, permettant ensuite de pouvoir se prononcer sur des résultats fiables.
Néanmoins, Olivier Verdeil nous a fait remarquer que la peinture Coolroof donne de très bons résultats de performance, là où la toiture végétalisée semble être moins efficace du point de vue de la production électrique. Il faut cependant noter que cette dernière a l’avantage d’avoir des co-bénéfices environnementaux plus importants.
Expérimentation à Barangaroo par l'Université technologique de Sydney
Entre août 2020 et juillet 2021, l’Université technologique de Sydney a mené une étude visant à comparer une toiture biosolaire à une toiture simplement équipée de panneaux photovoltaïques dans la banlieue de Barangaroo, à Sydney.
Respectivement, les toitures végétalisées et conventionnelles disposaient de 593,96 m² et de 567,44 m² de couverture photovoltaïque. Avec près de 40,66% de la toiture végétalisée recouverte par les panneaux solaires. Le type de végétation y était extensive avec un substrat de 120 mm.
Dans un
rapport publié en juin 2021, l’enquête
(P.Irga et al., 2021) met plusieurs observations en valeur :
- Biodiversité : la variété d’insecte et la présence d’oiseaux étaient largement supérieurs sur la toiture végétalisée.
- Pollution de l’air : le toit végétalisé avait un potentiel d’élimination des polluants, comme le protoxyde d’azote, l’ozone et les particules fines, supérieur au toit conventionnel grâce au feuillage.
- Isolation thermique : la température en surface des toitures était moins élevée sur la toiture végétalisée, avec une valeur pouvant atteindre -20°C certains jours d’été. Cet effet de rafraîchissement a également été observé sous les panneaux solaires.
- Absorption de carbone : la toiture végétalisée a permis d’atténuer la production de 3,3 t-CO2e (tonnes de CO2 équivalents) de plus que sur la toiture conventionnelle, notamment grâce au processus de photosynthèse permis par la végétation.
- Ruissellement : d’après leur simulation, les chercheurs ont démontré que le sol végétal pouvait absorber une plus grande part des eaux de pluie lors de tempêtes. Dans leur cas, 600 litres par secondes de plus que le toit conventionnel en cas de tempête de très forte intensité.
- Efficacité énergétique : testé dans des conditions similaires, les panneaux photovoltaïques de la toiture végétalisée ont un généré jusqu’à 3,63% d’énergie en plus.